RAPPEL DU CONTEXTE
Pour toutes les villes (sauf exceptions) situées à l’intérieur de l’A86, des restrictions de circulations seront imposées aux véhicules de tous usages équipés d’une vignette Crit Air 3, ceci à compter du 01/01/25. Il s’agit d’une étape supplémentaire dans un processus qui s’est déjà traduit par une éviction en 2019 et 2021 des véhicules les plus polluants. Issy est donc évidemment concerné.
Pour autant, si l’objectif d’une réduction des pollutions issues de la circulation auto est des plus louables, ses justifications et surtout son caractère contraignant restent sujets à caution. Il est plus que temps de critiquer ce dispositif qui est gros d’injustices, d’efficacité limitée, de fractures géographique et sociale.
Vos élus Vivre Issy Pleinement se sont donc prononcés « contre » lors du conseil municipal du 10 octobre 2024.
ZFE : Zone à Faibles Emissions
DES ARGUMENTS DE FORME
– Une consultation métropolitaine d’autant plus bidon…
L’avis demandé par le Maire s’inscrivait dans une logique consultative que l’on aurait préférée se déployer avant que n’intervienne le texte d’une loi, dont le propre est d’être général et contraignant. Une consultation est donc proposée sur le site de la Métropole du Grand Paris, qui a pris fin le 14 octobre 2024. Autant dire qu’elle n’a pas rencontré un grand succès puisque 1704 personnes y ont participé et 1752 ont apporté une contribution, alors que jusqu’à 5,61 millions de personnes sont potentiellement concernées. Cette désaffection s’explique simplement : il ne fallait pas faire de publicité auprès des Franciliens dont on sent bien qu’ils ne seront de toute façon guère favorables à cette ZFE !
– qu’elle est fondée par des études dont l’impartialité n’est pas la vertu première
A l’appui de la mise en œuvre des ZFE, on trouve des études émises par des instituts comme Airparif, l’Apur ou bien l’Observatoire régional de Santé. L’objet social de ces entités est d’alerter sur l’existence des risques sanitaires et environnementaux liés aux pollutions, notamment automobiles. On peut toutefois douter de leur impartialité, car c’est justement leur rôle, pour ne pas dire leur gagne-pain, que de tenir un discours alarmiste à propos d’un contexte général, sauf à se tirer une balle dans le pied. Sans parler de l’argument de mauvaise foi disant que la mise en œuvre de la ZFE éviterait une centaine de décès ainsi que 10 survenances d’AVC en Île de France. Si vous êtes contre les ZFE, c’est peut-être parce que vous êtes à abominable assassin… Au demeurant, ces études reconnaissent la nette amélioration de la qualité de l’air observée depuis 5 ans.
– … et que la mise en place d’une ZFE Crit Air 3 est déjà exigée par la loi
La mise en œuvre de la ZFE Crit Air 3 découle en effet des lois d’orientation des mobilités (2019) et climat et résilience (2021) pour les agglomérations de + de 150 000 habitants qui ne respectent pas les normes de qualité de l’air liées au dioxyde d’azote & aux particules fines. On peut donc être surpris d’avoir à se prononcer sur une contrainte que la loi organise déjà. L’avis demandé est donc purement consultatif. Raison de plus pour qu’il soit négatif, simplement pour rappeler que vos élus VIP n’ont pas été dupes du caractère factice de cette consultation. A quoi bon en effet donner un avis positif si le législateur a déjà plié le match avec ses gros sabots ? A noter en outre que les études jointes au dossier indiquent que ce type de ZFE nous mettrait en règle une fois pour toute avec le droit européen. Erreur : les ZFE n’empêcheront jamais ce dernier d’être manipulé par des associations militantes qui sont, de toutes façons, anti-voitures. Ces mesures seront toujours trop laxistes à leurs yeux, tout simplement parce qu’elles s’inscrivent dans une logique totalitaire, à la recherche du prochain tour de vis décroissantiste.
DES ARGUMENTS DE FOND
– Une mesure liberticide
Il s’agit d’un système qui pénalisera avant tout les conducteurs dont le besoin de mobilité ne relève pas de la lutte du bien contre le mal, mais d’une nécessité qui est humaine, avant même d’être économique. De plus, ce dispositif porte les germes d’une contestation dont notre région n’a pas forcément besoin : j’ai donc une voiture, dont on prétend m’interdire l’usage. Voilà bien qui est attentatoire à ma liberté d’aller et de venir. En outre, la mise en place de cette ZFE s’accompagne déjà de dérogations bien compréhensibles et au demeurant fort hypocrites. Ces dérogations visent en effet à désamorcer la levée de boucliers que les ZFE vont immanquablement provoquer chez nos concitoyens réticents, et on les comprend, à acquérir des voitures propres, dont les prix restent dissuasifs. A noter en effet que Paris envisage la délivrance d’un pass 12 jours, dont la demande serait effectuée en ligne sur une plateforme numérique gérée par la MGP, renforçant ainsi le contrôle numérique des pouvoirs publics jusqu’aux actes les plus anodins de notre vie quotidienne.
– Une mesure d’exclusion sociale
La ZFE Crit Air 3 touchera donc prioritairement les plus pauvres qui conduisent les véhicules les plus anciens, les plus polluants et les diesel, achetés à une époque où ils étaient encore rentables comparés au prix du super. Ce sont surtout eux qui habitent le plus loin des centres-villes et de leur lieu de travail, et qui sont les plus dépendants de leur véhicule pour circuler. Restreindre l’usage qu’ils pourront en faire sera forcément une mesure antisociale qui les affectera directement. Si ces personnes habitent dans l’une des 77 communes de la ZFE, elles ne pourront donc plus utiliser leur propre véhicule. Les communes du 93 ne s’y sont d’ailleurs pas trompées, puisque beaucoup d’entre elles ont été soigneusement exclues de la ZFE. A noter d’ailleurs que la desserte de notre propre commune y perdra tout autant, puisqu’un certain nombre de gens venant des autres communes ne pourront même plus rouler jusqu’à nous pour faire tourner l’économie isséenne.
– Une mesure qui méconnaît l’usage du véhicule ainsi que sa fréquence
Le principe de la ZFE est de dire qu’un véhicule pollue d’autant plus qu’il est ancien. Ce dispositif ne tient donc pas compte de l’usage réel qui est réellement fait du véhicule en question. Un véhicule ancien et “polluant” circulant peu est-il vraiment plus polluant qu’un gros véhicule récent et qui circulerait tous les jours ? Un véhicule ancien, mais affecté au covoiturage, par exemple, est-il plus polluant que quatre véhicules récents mais qui seraient tous mono-passagers ? C’est donc bien l’usage du véhicule, plus que son ancienneté, qui est le critère objectif à prendre en compte pour garantir l’amélioration de l’air ambiant. A ce titre, c’est donc bien le contrôle technique, véritable « juge de paix » de l’usage d’une voiture sur le long terme, plus que les contraintes issues d’une ZFE contraignante pour tous, qui assainira le parc auto francilien, permettant ainsi des améliorations sensibles de la qualité de l’air que nous respirons.
– Une mesure dont les coûts complets sont cachés
Le coût complet du dispositif ZFE Crit’Air 3 sera tout autant à la charge des collectivités que des particuliers. Si le particulier sera bien forcé de changer de voiture ou de la moderniser, des coûts à la charge des collectivités sont aussi à prévoir s’agissant du contrôle du bon respect de ce dispositif : mise en place de portiques de contrôles automatiques, caméras, des coûts de maintenance que l’on se garde bien de budgéter, mobilisations des polices municipales, qui ne pourront être affectées à d’autres tâches plus utiles et plus urgentes pour l’ordre public. Pour le particulier, ces subventions peuvent être trompeuses, car accessibles sous conditions de ressources et ouvertes à un petit nombre. Ces subventions seront également soumises à la discrétion du législateur. Réversibles à tout instant, elles pourront être réduites par les pouvoirs publics. Voire carrément supprimées, comme la fameuse prime à la conversion.
– Une notion de ZFE devenue inefficace en 2024
Une étude d’Airparif publiée au dossier justifie les améliorations de la qualité de l’air au titre de la ZFE Crit’Air 3 sur la base des progrès observés suite à la restriction de circulation des véhicules à la vignette Crit’Air 4 entre 2019 et 2023. Pourtant l’étude en question n’établit pas de causalité ni même de corrélation entre l’interdiction des automobiles de Crit Air 4 dans la ZFE et cette amélioration. Tout au plus parvient-elle à prouver une concomitance, mais en aucun cas une causalité. Car sur cette période, des facteurs étrangers à la mise en place d’une ZFE excluant le Crit’Air 4 sont aussi intervenus pour réduire les pollutions. En effet, la période considérée se caractérise surtout par une réduction des voitures diesel et de leur circulation en Ile de France. Or, il s ‘agit là d’une tendance bien antérieure à l’instauration des ZFE et commune à toute l’Europe, car les constructeurs ont cessé de vendre et donc de fabriquer des moteurs diesel. Ils ont considéré que le prix du diesel à la pompe se rapprochant de celui des carburants sans plomb, l’avantage économique à rouler au diesel diminuait, incitant les automobilistes à préférer au final les motorisations essence, plus propres. A noter en plus que le contrôle technique a lui aussi permis de retirer de la circulation tout une série de voitures polluantes, sans qu’il y ait eu besoin d’une quelconque ZFE pour parvenir à ce même résultat.
Plus qu’une contrainte réglementaire, pour ne pas dire idéologique, à savoir les ZFE, c’est sans doute bien un argument économique, lié au prix des carburants et au renouvellement normal des flottes de véhicules au profit de l’essence qui débouche sur l’amélioration de la qualité de l’air observé par Airparif. Si un phénomène naturel est déjà engagé avec la raréfaction des moteurs diesel, est-il vraiment nécessaire de forcer cette tendance, si on doit concomitamment heurter jusqu’aux plus fragiles de nos concitoyens ? Sauf à vouloir bien sûr finir de les dégoûter d’une transition écologique, dont on oublie trop souvent que, dans « transition écologique », il y a aussi « transition ». Chose que vos élus VIP ont parfaitement à l’esprit.